Le couscous, c'est bon comme chez moi !
C'est définitivement l'un des plats préférés des Français. Convivial en diable, facile à préparer à l'avance. Saveurs exotiques que nous avons toutes faites nôtres depuis bien longtemps, qui invitent au voyage, souvenirs de vacances, après-midis brûlants où le soleil écrase les ombres au long des murs blancs, répondant au bleu insolent d'un éternel été. Quand le jour doit à la nuit son tribut de chaleur, faisant offrande d'épices somptueuses au palais. Mille et une nuits tenant entières dans une assiette à l'équilibre parfait.
Mais si le couscous est un écho, c'est aussi un sacrifice au temps, à ces heures en cuisine où les parfums se construisent au gré du frémissement de l'eau lentement transmutée en bouillon rougeoyant. Où le feu des piments se mesure au bout des doigts, où la semoule roule sous les paumes usées en un balancement cadencé au rythme de sourdes mélopées.
C'est d'ailleurs pourquoi bien souvent on n'ose le confectionner. Déléguant à d'autres, restaurant ou traiteur, la confection du plat, quand on n'ouvre pas avec quelque honte vite évincée une boîte achetée en hâte au rayon d'un supermarché.
Il n'y a pourtant rien de plus simple à réaliser qu'un vrai bon couscous. D'autant aujourd'hui où le Progrès s'invite à table, dispensant les étapes quelque peu fastidieuses de la tradition ancestrale.
C'est un petit guide pour paresseux que je vous livre là, mais qui ne s'exonère pas de l'essentiel : les bons produits. A commencer par les épices. Privilégiez les mélanges artisanaux, concoctés avec amour par de petites boutiques qui sourcent les origines, dosent avec savoir-faire, faisant naître la magie.
Le ras-el-hanout bien sûr, capable du pire comme du meilleur, mélange de cannelle, cumin, poivre, girofle, gingembre, curcuma, quatre-épices, coriandre, muscade, fenouil, anis vert... Aucune recette n'est la même, la qualité du produit variant autant que son originalité. C'est la base du bouillon de cuisson des viandes et des légumes.
J'y ajoute personnellement un peu de cannelle, de coriandre, de cumin, un poil de safran, de paprika, et une pointe de harissa.
L'harissa justement, le mélange qui va faire toute la différence. Dont le feu écrasera toutes les saveurs ou qui donnera au plat toute sa subtilité. C'est là qu'il faut vous parler de l'harissa à la rose. Un mélange divin, apportant tout autant l'ardence et la fraîcheur. J'utilise celui des épices Shira, une merveille souvent en rupture sur le site de la marque, grâce à laquelle vous ne verrez plus le couscous comme avant. Et de grâce, oubliez le tube au phare, qui emporte tout sur son passage, à commencer par vos papilles.
Les viandes maintenant. D'ailleurs ce pourraient être des poissons. Même si le couscous dit royal -une spécificité française, inventée juste pour nous, est un mélange de poulet, d'agneau et de merguez. Alors qu'en réalité le couscous (comme la paella d'ailleurs), est traditionnellement cuisiné à partir d'un seul type de viande ou de poisson.
Soyons chauvins, partons sur le choix du roi. De belles cuisses de poulet fermier (label rouge), du collier d'agneau plutôt que de l'épaule ou du gigot, qui sera plus moelleux même s'il nécessitera davantage de dégraisser le bouillon. Un agneau fermier là aussi. De chez votre boucher. Une bête bien née. De même pour les merguez, ces saucisses de boeuf et d'agneau relevées et colorées de rouge. Ayez la certitude de leur provenance, du savoir-faire de leur confection, car s'il est bien un produit qui offre le pire comme le meilleur c'est celui-ci.
Les légumes maintenant. Carottes et courgettes bien sûr, oignon en garniture. Et pour le reste écoutez la saison. Les courges l'hiver, l'aubergine ou le poivron l'été. Et bien sûr les tomates. De conserve l'hiver, c'est une telle évidence. Qui pourrait bien penser que la tomate de février remplace avantageusement des tomates bien mûres d'été, conservées dans leur jus ?
Vient alors l'épineuse question des pois-chiches. Si vous avez le temps, faites tremper les graines une nuit avant de les cuire au bouillon vous-même. Sinon... eh bien sinon ouvrez un bocal. Des pois-chiches bio, cuisinés au jus, feront parfaitement l'affaire.
Des raisins de Corinthe. Ça c'est non négociable. De beaux gros grains séchés que vous allez réhydrater doucement.
Et le bouillon ? Il y a deux écoles. Les courageux qui auront préparé un bouillon maison de volaille avec des carcasses (et/ou de légumes). Et les autres. Qui le prépareront avec des sachets de bouillon Ariaké, une alternative de qualité tout à fait acceptable (que vous pourrez d'ailleurs corser en rajoutant quelques légumes, céleri, oignon, échalote, thym, ail...)
Enfin, la semoule. Et là je vous vois venir. Oui, la cuisson de la semoule, longue et délicate, vous décourage de vous lancer dans la recette. Là encore, le Progrès est passé par là. Vous trouverez dans le commerce des semoules précuites (sur le même principe que la polenta), prêtes en cinq minutes. Enfin pas tout à fait. Parce que ça ne vous exonérera pas de l'égrénage, cette étape cruciale durant laquelle vous allez rouler dans vos mains les grains afin d'éviter toute agglomération. C'est en réalité très simple, et même plutôt rigolo, pour peu que vous ayez la bonne semoule, et que vous ayez scrupuleusement suivi les instructions sur le paquet. Attention, toutes les semoules, précuites ou pas, ne se valent pas. Certaines agglomèrent plus que d'autres, à éviter à tout prix. Ce n'est d'ailleurs justement pas une question de prix. Faites vos tests avant de vous lancer, vous verrez très vite si le paquet choisi vous simplifie la vie.
Avec tout ça, la préparation du couscous, dont l'essentiel peut se faire à l'avance et mijote tout seul, n'est plus une corvée, et vous allez bluffer votre monde.Ça y est ? Prêts à vous lancer ? On y va.
Ingrédients (pour 4 personnes) :
500 g de semoule fine précuite (la marque Golden Sun tient toutes ses promesses)
4 cuisses de poulet fermier
3 morceaux de collier d'agneau fermier
8 merguez de bonne qualité (de préférence achetés chez votre boucher si vous avez toute confiance en lui)
5 carottes
3 courgettes
1 potimarron en saison (ou 1 belle aubergine et 1 poivron l'été)
1 gros oignon
1 grosse boîte de tomates entières pelées avec leur jus
1 boîte de concentré de tomates
2 gousses d'ail
1,5 litre de bouillon de volaille (et/ou de légumes), maison ou à réaliser avec des sachets de bouillon Ariaké
1 grosse poignée de raisins de Corinthe
1 bocal moyen de pois-chiches bio
1 pot de harissa à la rose
1 pot de ras-el-hanout
QS cannelle, cumin, coriandre, safran (à défaut un sachet de Spigol), paprika (doux ou fort selon le goût), sel, poivre, huile d'olive
Préparation :
Dans une cocotte en fonte ou un grand faitout faire revenir les cuisses de poulet dans un filet d'huile d'olive bien chaude. Les laisser dorer de tous les côtés. Réserver. Faire de même avec les morceaux de collier d'agneau que vous aurez fait couper en quatre par votre boucher. Réserver. Eponger le gras.
Eplucher et ciseler l'oignon. Le faire suer au fond de la cocotte. Ajouter les carottes épluchées et coupées en tronçons puis en deux, les tomates et le concentré, et les gousses d'ail. Remettre les viandes, le bouillon qui doit plus que recouvrir l'ensemble, saler, poivrer, ajouter une demi-cuillère à café de canelle, autant de cumin, autant de coriandre, autant de safran (un sachet de Spigol), autant de paprika, autant de harissa, et deux cuillères à café de ras-el-hanout.
Porter à frémissement et laisser cuire durant trois bons quarts d'heure. Au bout de ce temps rajouter le potimarron (ou le poivron en saison). Laisser cuire un quart d'heure de plus. Ajouter enfin les courgettes (et l'aubergine en saison). Laisser cuire vingt minutes de plus. Couper le feu. Laisser refroidir à température ambiante. Cette cuisson peut être réalisée la veille.
Quand tout a refroidi, ôter les viandes et les légumes délicatement, en les séparant (viandes d'un côté, légumes de l'autre). Laisser figer le bouillon au réfrigérateur (ou au congélateur si vous êtes pressé). Le gras de l'agneau va remonter à la surface. Le retirer à l'aide d'une petite écumoire et de papier essuie-tout et le jeter.
Remettre les viandes au fond du bouillon, puis les légumes toujours délicatement pour ne pas les écraser. Ajouter les pois-chiches égouttés. Réserver au frais jusqu'au service.
Une demi-heure avant le service, faire réchauffer doucement la cocotte. Faire gonfler les raisins dans un peu de bouillon chaud. Prélever deux grosses louches de bouillon et ajouter l'harissa en quantité suffisante (ni trop ni trop peu, disons en moyenne trois cuillères à café de pâte). Chauffer doucement et fouetter.
Juste avant le service, préparer la semoule. Selon la recette faire chauffer un volume d'eau salée équivalent à celui de la semoule. Ajouter une pointe d'huile d'olive (quelques gouttes, très peu, juste pour graisser un peu la semoule). Quand l'eau bout, la verser dans un grand saladier, jeter la semoule dessus, égrener à la fourchette, couvrir et laisser gonfler cinq minutes. Au bout de ce temps égrener à nouveau à la fourchette puis, avec des mains propres, rouler les grains entre les paumes pour détacher les grains, tout en remuant de haut en bas l'ensemble de la semoule. Quand il n'y a plus de semoule agglomérée c'est prêt.
Egoutter les raisins et les déposer dans un bol. Préparer un bol avec le bouillon relevé d'harissa et un autre de bouillon simple.
Egoutter les viandes et les légumes.
Poêler les merguez à sec dans une poêle bien chaude.
Dressage :
Disposer tous les plats sur la table afin de laisser les convives se servir selon leur goût.