Le printemps des morilles


Champignon rare et capricieux, la morille fraîche se ramasse de mars à mai, quand le printemps est là, juste après le froid et la pluie. Elle pousse dans les lieux frais et humides, argileuxou calcaires, au pied des pommiers, des frênes ou des noisetiers. On peut la voir surgir sur des gravats de plâtre, dans les friches, les jardins ou les vergers, au pied des ruisseaux et des rivières, sans qu'elle soit fidèle à un coin particulier. Mais de toute façon personne ne vous dira où les trouver : les morilles, c'est comme les sources, ca ne se dit pas.
Un chapeau allant du blond au brun, avec souvent quelque rousseur, des alvéoles au dessin unique et prodigieux qui donne l'illusion d'une chevelure ondulée sur un pied clair, un parfum unique de sous-bois, de noisette, de viande et de fruits... vous l'aurez compris Dame Morille est une jolie femme qui se fait désirer. 
A consommer dans les deux ou trois jours après cueillette, comme tous les champignons il faut la nettoyer avec un linge humide et surtout pas la passer sous l'eau du robinet, ce qui gorgerait ses alvéoles et la tendrait insipide.
On en trouve parfois sur les étals des marchés, mais la plupart du temps elle s'achète séchée, ce qui permet de la cuisiner toute l'année. 
Elle fait partie des champignons qui ne se consomment pas crus car elle contient une substance dangereuse pour les globyles rouges, l'hémolysine, qui disparaît à la chaleur après 15 minutes de cuisson, ou à la déshydratation. Sa texture ferme supporte les cuissons longues en sauce ou dans un jus dont elle arrondit le goût. 
La morille s'accorde avec tout, viandes blanches ou rouges, veau, agneau,boeuf, volailles (le fameux poulet au vin jaune et aux morilles) ou poissons. Elle sublime les oeufs, le riz et les pâtes, et n'aime tant rien que les petits légumes nouveaux. C'est un délice sur des asperges, avec une bonnotte de Noirmoutier, des petits navets, des fèves ou des petits pois. 
Quand on la réhydrate on utilise bien sûr son eau de trempage. Dans un risotto, une sauce crémée, pour corser son goût. 
Sèche on peut la mixer et la saupoudrer sur un filet de sole ou de limande, un suprême de volaille.
Les plus aventureux oseront incorporer cette poudre dans un dessert, sous forme de tuile, de biscuit, dans un sabayon ou une crème brûlée.
Enfin, bonne fille elle s'accorde à la plupart des vins, blancs ou rouges, complexes ou faciles. 
Son seul défaut est son prix, assez élevé, mais la puissance de ses arômes permet de l'utiliser en petite quantité. Et puis vous connaissez la chanson... le prix du burger de fastfood, toussa, toussa.