Tea for two chez Chris'teas

Si le café réjouit mon coeur d'Italienne, le thé pour moi est un voyage. La lente traversée du fleuve dans la moiteur de l'Asie, le bac glissant sur l'eau lourde, les arbres au loin, immobiles. Le temps suspendu au chapeau de feutre de la petite, à l'or dérisoire de ses chaussures, et cet homme élégant fumant des cigarettes anglaises. La rêverie d'une fin d'après-midi, quand la pluie froide s'invite aux carreaux, et le liquide ambré qui réchauffe les doigts et l'âme à travers la fine porcelaine. J'aime le thé clair, ma préférence allant au blanc, à une exception près, le Lapsang Souchong, dont la magie noire m'ensorcelle. 

Très longtemps, toute mon enfance durant, et même une partie de mon adolescence, j'ai cru qu'il n'existait qu'une sorte de thé, un breuvage au goût uniforme et aux accents de pub anglaise destinée à faire rêver au grand Empire britannique disparu -la Villageoise du thé en quelque sorte. Et puis un jour mon  ancienne maîtresse d'école m'a invitée à prendre le thé. Un breuvage âcre, aux reflets d'anthracite, dans lequel aucun coeur ne se pouvait refléter. Polie, j'ai bu quelques gorgées, plongeant sans retour dans le maelstrom. Je n'approchai plus une tasse de thé de quelques années.

Le goût m'est revenu durant mes années parisiennes, avec cette petite boutique de la rue des Belles Feuilles (mais peut-être n'était-ce pas là, mes souvenirs s'embrument dans les volutes de la tasse). C'est là que j'ai découvert le thé fumé. Et pris conscience de mon attrait pour cette saveur particulière qui marque souvent ma cuisine. 

Un Lapsang et un honnête thé russe, pour les petits-déjeuners de mamie, et mon bonheur était parfait. Puis le temps a passé, ouvrant le monde et ses parfums. D'autres rivages, d'autres feuilles de camelia, sont venus jusqu'à moi. Le thé prenait d'autres couleurs. Jusqu'à ce que le marketing triomphant impose à la bouche et à la bouilloire des fashionistas un must au nom russe surfant sur les vagues normandes des boissons aromatisées. 

De ces promesses factices une fois de plus je ne voulais pas, et mon thé attendrait. Et puis, de retour à Bordeaux, j'ai poussé la porte bienheureuse, attirée par l'élégance du lieu, les grandes boîtes métalliques oranges, ce quelque chose qui disait le raffinement sans ostentation et l'amour du produit. 


Et Chris'teas fut. A mes yeux ravis du moins, car le palais des Bordelais était depuis longtemps sous le charme de cette maison née sous de si beaux auspices. Petite-fille d'un négociant en thé, Christel, la fondatrice de la marque, ouvre en 2001 un salon de thé dans le romantique passage Sarget, où se presse le tout Bordeaux. Elle répond à la demande du Grand Hôtel qui souhaite la voir créer pour l'établissement un thé unique, mélange signature. De cette collaboration est née Chris'teas, où elle propose ses assemblages, tracés et sourcés, faits de thés rigoureusement sélectionnés, de fleurs et de fruits séchés, d'écorces d'agrumes. Et c'est là toute la différence. Visible à l'oeil. Fragiles pétales de rose ou de bleuet, bergamote, citron ou pamplemousse, mangue, cerise ou pêche confite... l'oeuvre de Dame Nature.

Grands crus ou mélanges gourmands, invitant au voyage, ils portent les noms d'ici, de ces lieux emblématiques qui font tant rêver : Grand Théâtre, Notre-Dame ou Banc d'Arguin, ou bien ceux d'un instant, d'une saison, le thé du Dimanche, celui du Père Noël... Des thés d'amour aussi, à offrir à l'élu(e) de son coeur. Des thés du monde entier, noirs, verts ou blancs, sencha, bancha (iodé), maté, pu-erh fermentés, rooïbos...  pour les amateurs exigeants de variétés pures. Et puis des eaux, de fruits et de fleurs, à boire chaudes ou froides. Des tisanes aux mille vertus. 

En sachets, en boîtes désormais iconiques, ou en dosettes habillées de gaze, tous les choix sont permis. De jolies boîtes en forme de canelés servent d'écrin à ces produits exceptionnels, en écho au fameux thé au canelé, l'une des spécialités de la maison. 

Théières, tasses et infuseurs permettront aux amateurs de déguster ces breuvages de belle façon. Saviez-vous que le thé ne bout pas ? Il requiert le temps et la juste température à son infusion, différente suivant sa nature -un précieux conseil indiqué sur les thés Chris'teas.

Vous pensiez que le thé n'était qu'une boisson. Oubliez tout, le thé s'invite en cuisine. En accord avec les mets, à l'instar des vins ou des sakés, mais aussi dans les recettes. Un foie gras au thé fumé, un baba punché avec un mélange de la maison, une Saint-Jacques cuite en vapeur de thé Faites un voeu, subtil accord mentholé de pin et de vétiver... Osez.

Chris'teas expédie ses précieux via son site, la distance n'est plus une excuse pour ne pas les découvrir.

Chris'teas

Place des Grands Hommes Bordeaux

Du lundi au samedi de 10h00 à 19h30 (horaires possiblement décalés en raison des restrictions COVID)

Tous les dimanches de décembre de 11h00 à 18h00

33 (0)5 56 52 19 79

site internet : http://christeas.fr