Alexandre Mazzia, bien au-delà des étoiles


Le véritable voyage, ce n'est pas de parcourir le désert ou de franchir de grandes distances sous-marines, c'est de parvenir en un point exceptionnel où la saveur de l'instant baigne tous les contours de la vie intérieure. (Saint-Exupéry)

2019 fut l’année Mazzia, diront d’aucuns, et il n’auront pas tort. Les récompenses et les éloges ont éclairé la route du chef tout au long de ces derniers mois, et pleuvent encore presque chaque jour. Deux macarons au Michelin, chef de l’année Gault & Millau, articles, radios, reportages télé, vidéos… Que pourrais-je donc vous dire qui n’a pas déjà été évoqué, dans ces colonnes aussi d’ailleurs où je vous avais fait part de mon émotion il y a un an, face à la reconnaissance de ses pairs ?
Mais voilà, je ne crois pas au hasard, persuadée que je suis que la bonté et le bonheur qu’on distribue vous reviennent un jour. Et cet homme-là donne beaucoup. C’est fragile le bonheur, comme la vie qui palpite. C’est un regard, une attention de tous les instants, un respect et un égard à l’autre. A ceux pour qui il cuisine, bien sûr, qu’il embarque dans ses voyages sensoriels, mais pas seulement.
Je pense d’abord très fort à Marco, son alter ego, que sa foi et son envie d’y croire ont porté, Marco à qui il a dédié cette deuxième étoile, comme une promesse tenue.
A d’autres grands aussi, qui ont trouvé soutien à son bras dans les jours difficiles, se sont réchauffés à sa prunelle empreinte de tant de douceur.
A son équipe avec qui il forme un tout, une osmose perceptible jusque dans la salle du restaurant, en un ballet qui prend corps à chaque service.
A ses fournisseurs aussi, maraîchers, pêcheurs, qui lui apportent le meilleur avec les yeux qui brillent, parce qu’il sait leur travail, la sueur versée pour l’exception. Parce qu’un jour il a posé le genou, lui le grand gaillard, dans la terre ou au fond d’une barque, parce qu’il a écouté. Parce qu’il sait le vent et les oiseaux, l’odeur des herbes et les poissons qui ruissellent, la tête dans les nuages, cherchant l’accord inouï, qui bluffera nos papilles, nous ouvrira la porte de mondes inconnus.
A Marseille, à ce pas de deux, l’homme et la ville, la ville et l’homme. Perdus et retrouvés dans l’infini du bleu.
Je pense enfin à mon dernier déjeuner chez AM, un jour de l’été dernier. Mesurant tout le travail accompli, la grâce avec laquelle il a porté sa cuisine encore plus haut, encore plus loin, à cette folie douce propre aux voyages au long cours, quand le temps est suspendu aux mains du capitaine.
Ce déjeuner, justement, où j’ai fait le tour du monde -du sien et de celui dont je rêve dans mes désirs d’assiette les plus fous. Un billet pour ailleurs sans taxe carbone. Non pas sept, mais cent merveilles qu’éclaire le phare d’Alexandre. Quelque part entre Japon et Italie sur un crousti-galanga, boeuf wagyu et Campari, retour de plongée avec la chair de l’araignée, le denti mariné betterave saké, randonnée en Afrique au détour d’une langoustine, carottes, manioc, lait de poule.
Un périple où la boussole s’agite sans cesse, où les caps changent, donnant chaque fois un autre Nord, à la faveur d’une bouchée oignons, aubergine cristallisée, mozzarella di buffala, fraise, d’une anguille fumée au chocolat, d’une daurade au jus de canard, jus vert saté, framboise harissa, d’un canelé au café, kiwi tamarin hibiscus...


Il y a les bons cuisiniers, les grands cuisiniers, les cuisiniers de l’âme... et puis il y a Alexandre. Succombez à son invitation au voyage.

AM par Alexandre Mazzia 
9, rue François Rocca 13008 Marseille
33 (0)4 91 24 83 63
http://www.alexandremazzia.com/
(réservations en ligne)